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Florès J4

Enfin, la chance et la météo sont avec nous !!! Le Kelimutu était totalement dégagé ce matin au lever du soleil et nous avons pu voir les 3 lacs volcaniques nichés au creux de ses 1600 m d’altitude.

Il parait que ces lacs changent régulièrement de couleur et qu’ils sont passés ces dernières années par le turquoise, le noir, le bleu, le café au lait et le vert olive. Nous devons manquer d’imagination mais nous n’avons qu’un lac sombre et 2 lacs entre bleu et turquoise. Mais c’était très beau tout de même, au lever du soleil, dans la brume du train de nuages de 6 heures 30, et une fois le soleil revenu. Tout particulièrement depuis un point de vue totalement interdit au-dessus des 2 principaux lacs.

On y monte en voiture et la dernière demi-heure de grimpette est très facile, mi- escaliers mi-chemin. Et on n’y est pas tout seul, même si le nombre de touristes présents ce matin reste raisonnable… Des marchands de café, thé, soupe, gâteaux et les incontournables ikats nous y attendent.

Il y a sans doute beaucoup plus d’esprits que de touristes, dans cet endroit sacré pour les animistes. Aux trois quarts de la route qui monte, on trouve une porte qui ouvre sur un petit sentier. C’est ici que les esprits des morts se séparent en 3 groupes, un pour chaque lac : les jeunes, les vieux et les méchants…

Henri, Georges et moi n’en croisons pas quand nous faisons une partie de la descente à pied en empruntant un petit sentier bien raide et bien glissant qui serpente entre champs de bananiers, maisons et chutes d’eau. Mais ce que j’ai vraiment préféré (!!!), c’est la traversée du pont de bambous branlants, sans rambarde et pas bien large, surplombant un petit torrent sur une bonne vingtaine de mètres… Pas ma tasse de thé, ça !!!

Le ciel bleu s’est couvert sans que nous nous en rendions compte. Et soudain, un énorme bruit nous fait sursauter : c’est la drache de midi qui frappe violemment les tôles ondulées du toit de l’hôtel. Une vraie pluie de mousson qui transforme la route en torrent et cache le paysage derrière un épais rideau opaque et ruisselant.

Elle s’est calmée quand nous partons visiter le village Lio de Wolo Gai (prononcer Ouolo Gaille). Il y a 5 ethnies et 5 langues et coutumes différentes qui se partage l’île de Florès (Ngada, Sikka, Lio, Maggarai et Larantuka). La capitale de l’ethnie Lio est Ende, où nous passerons demain (au moins le temps de déjeuner et de publier sur le blog dans LE restaurant équipé de Wifi) et d’où nous quitterons Florès pour Sumba en avion mercredi. Wolo Gai est le village le plus traditionnel et « spirituel » de cette ethnie dans la région de Moni. Il a entièrement brûlé en septembre 2012 et a été refait depuis.

La maison jusqu’à laquelle nous pataugeons et dont le propriétaire, un des chefs des 14 clans du village, nous invite à prendre le café avec lui, sa femme et sa fille, est très belle et totalement achevée. Mais pour en arriver là, il a fallu beaucoup de temps et d’argent. Moins pour les matériaux que pour les cérémonies qui accompagnent obligatoirement chaque rénovation importante. Refaire un toit par exemple coûte au moins 50 cochons, une vingtaine de vaches et autant sinon plus de poulets, de chiens, de poissons… qui seront égorgés pour nourrir les esprits… et l’ensemble du clan forcément présent à la cérémonie !

Vous voulez voir la maison ? Nous avons pu l’observer et la visiter tranquillement, puisque contrairement à des touristes de passage, nous retournons à Moni ce soir. Ce qui enchante notre hôte, ravi de cette distraction avec des étrangers qui, pour une fois, ont du temps à lui consacrer. Henri a particulièrement apprécié les 2 paires de seins disposées de part et d’autre de la porte… et l’énorme mygale accrochée à un panier suspendu, mais trop vite disparue pour être immortalisée. Un animal de compagnie sans aucun doute…

Et une dernière chose : quand je vous disais que la tempête avait fait des ravages ! Il n’aurait pas fait bon passer sur la route à ce moment-là !!!

Petites histoires de mariages de dots chez les Lio

La famille de la promise doit d’abord donner son accord. Les discussions ne font alors que commencer et vont se dérouler longuement pour préparer et tâter le terrain de la dot de la mariée et de la richesse respective des 2 familles. Car au final, la famille de la mariée devra payer autant qu’elle recevra en dot… Les unités de compte : chevaux, défenses d’éléphants, argent…

Les rencontres familiales se succèdent durant de longs mois, chacune permettant de poser des jalons et de lancer des coups de sonde de part et d’autre pour estimer le champ des possibles. Les demandes se précisent progressivement du côté de la famille de la future mariée, mais elles ne s’énoncent pas directement. C’est le système du « gossip », susurré à l’oreille d’un proche de la promise, qui le susurre à la promise, qui le susurre à son promis, qui le susurre à sa famille… Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Ces demandes se basent sur l’estimation du bien de l’autre et du sien. Si les sœurs du futur marié sont elles-mêmes déjà mariées, il y a au moins un cheval par sœur dans la famille, et peut-être même des défenses d’éléphant. On peut aussi en emprunter à une cousine, une tante pour grossir sa pelote.

(C’est comme ça que des défenses d’éléphant en provenance d’Inde, introduites au 17ème ou 18ème siècle par les portugais qui voulaient les échanger contre du bois de santal, tournent depuis lors de famille en famille dans la partie Lio de Florès !!!)

Le mariage, financé à parts égales par les 2 familles, coûte cher aussi : pour une noce de 250 invités, il faut compter le double de chaises et de nourriture car la tradition est que chaque invité vienne avec un ami…

Il arrive que la famille de la jeune fille n’accepte pas celui qu’elle a choisi. Elle vient alors dire en face à l’autre famille qu’elle ne veut pas voir leur fils tourner autour de sa fille. S’ils insistent, la jeune fille est purement et simplement expédiée sur une autre île. Parfois, son amoureux la suit et lui fait un bébé. Ce qui peut permettre de dénouer le conflit. Mais pas toujours : dans certains cas, la famille de la « mariée malgré eux » prend le deuil 40 jours durant, considérant purement et simplement sa fille comme morte !

Et nous, après 41 ans de mariage, on n'a pas encore parlé de dot! Dingue non?

Allez, une dernière photo pour fêter ce nouvel épisode que je ne pensais pas pouvoir faire aujourd'hui...

A suivre!

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