Tout, même les meilleures choses, a une fin et le Geerewol n'échappe pas à cette règle. Les Wodaabe ont chanté et dansé toute la nuit du vendredi au samedi sans jamais s'arrêter, rythmant notre sommeil, nos rêves et nos nombreux réveils, et au petit matin, quand nous sommes sortis de nos tentes, ils dansaient et chantaient toujours. Une transe de plus de douze heures d'affilée, sous l'influence de la drogue qui les fait tenir pendant leurs danses et dont j'ai oublié le nom (si je l'ai jamais connu), et de leur envie de prolonger au maximum ces rencontres festives qui seront suivies de longs mois de transhumance plus solitaires... Il y a une vie pour les Wodaabe en dehors du Geerewol mais elle n'est pas drôle!
Et justement, c'est le premier jour de leur vie en dehors du Geerewol. Le temps de la remise en errance, des camps que l'on replie sur le dos des taureaux les plus forts et des ânes, des familles qui se rassemblent au sein de leur clan et autour de leurs troupeaux en quête de nouveaux pâturages.
En route, les Kirikous!!!!!
Le Chadwalla (???), un des fils du sultan avec lequel nous allons partir, est chargé des troupeaux du clan. C'est lui qui repère les bons pâturages, l'herbe riche et abondante qui va sonner le signal de l'arrêt.
Tommaso a obtenu que notre groupe de 10 accompagne un des sultans pendant 3 jours, avant de rentrer à N'Djamena puis en France. Nous allons marcher en compagnie de 15 familles et de leurs 300 bêtes à cornes, sans compter les ânes, les moutons et les chèvres... Enfin... Si on ne se trompe pas de direction, car dans notre enthousiasme, nous emboîtons le pas à d'autres familles, rattrapés in extremis par Jean-Yves, qui nous remet dans le droit chemin... La boulette!!!
C'est une "prrrrémière mondiale", comme dit Tommaso avec une ferveur toute italienne. Il faut dire que ce n'est pas si simple... Notre présence perturbe le bétail et complique la vie des bergers. Sans parler des taureaux avec lesquels il faut maintenir une distance de sécurité. Nous allons pouvoir constater le 2ème jour qu'un taureau énervé (heureusement, nous n'y sommes pour rien...) qui se débarrasse brutalement et sans préavis de son chargement, faisant peur à un âne qui lui-même éjecte la femme et le bébé qu'il transportait, ce n'est pas rien!!!!
Il est presque 11 heures quand nous nous mettons en route le premier matin (lendemain de fête oblige...) et il fait très, très, très chaud!!! Ce qui ne m'empêche pas de ressentir quelques frissons d'émotion : accompagner cette caravane qui marche depuis la nuit des temps, c'est un moment d'exception, une aventure unique et inoubliable. Que voulez-vous, le lyrisme de Tommaso m'a contaminée...
Parapluie et chèche de rigueur sous le soleil... Il faut aussi penser à boire toutes les 20 minutes au moins.
Heureusement, nous arrêtons de marcher vers 13 heures, l'herbe étant jugée de bonne qualité (les Wodaabe n'ont pas l'air d'être du genre à penser que l'herbe est plus verte ailleurs...).
Bonne idée d'ailleurs, car un nouvel orage menace...
Je triche un peu : ça c'est une photo du premier orage, mais c'est pour vous donner une idée des ciels dramatiques de cette zone du Tchad à la fin de la saison des pluies. Et ça c'est après l'orage... Heureusement que nous avons attendu pour choisir où planter les tentes !!!
Il fait nettement plus frais tout à coup...
Tout le monde se sèche et se réchauffe autour du feu. Même les chèvres ont le leur...
Serge a oublié d'étaler sa crème à bronzer, plus vraiment d'actualité. A moins qu'il ne cherche une femme??? Il se taille un petit succès comique en tous cas...
Il fait meilleur le deuxième jour, grâce à un départ aux alentours de 9 heures du matin. Il y a même un peu d'eau sur le chemin. Et plus de végétation, donc d'ombre aussi...
Et voilà le sultan qui passe, sur son cheval, avec son arc et ses flèches. La plupart des hommes Wodaabe ont un arc et des flèches, qui leur servent à se défendre contre les hyènes (leur plus grande terreur, comme l'étaient les loups autrefois chez nous) ou les chacals mais jamais à chasser.
L'étape du jour s'arrête également assez vite au bout d'un peu plus de 2 heures. Le but n'est vraiment pas de marcher pour marcher, mais de trouver les bons pâturages. De plus, les Wodaabe ont entendu parler d'un marché qui se tient dans un village voisin et le sultan a des courses à faire...
Bonne idée! Nous irons aussi. D'ailleurs nous l'emmènerons en voiture ainsi que son fils Ousmane (les voitures ne sont jamais loin de nous, ce qui aura permis à Manu, pas encore tout à fait remis d'une méchante fracture de la jambe il y a quelques mois, d'éviter la marche, et à une des femmes du sultan, piquée par un scorpion le premier jour et victime d'une forte fièvre, de se faire transporter).
Le trajet en voiture est moins fluide que la déambulation. Et le sultan, privé de ses repères habituels lorsqu'il fait route à cheval, ne nous est pas d'un très grand secours... Nous faisons souvent marche arrière, piégés dans des sentiers pour vaches qui se rétrécissent jusqu'à ne plus nous laisser passer. Mais nous finissons par arriver... au bout du monde. Là où les habitants ne doivent pas voir de touristes tous les jours. C'est à se demander si certains ont jamais vu de "nassaras" comme on appelle ici les blancs!
Et nous devenons l'attraction du marché... créant de véritables attroupements de curieux, qui nous prennent en photo et se font prendre en photos avec nous.
C'est tout juste si le griot du coin ne fait pas une annonce au mégaphone...
Peu d'alimentaire dans ce marché plutôt utilitaire, jusqu'à cette "boutique" de rechargement de téléphones portables...
Ce n'est pas tout ça, mais le temps passe. Il va nous falloir bientôt quitter les Wodaabe. Nous consacrons la 3ème matinée aux adieux et aux petits cadeaux. Pas de marche ce jour-là, certaines vaches ne sont pas en forme et le sultan a décidé de passer une nuit de plus sur place. Nous avons même dû renoncer à suivre les 2 bergers qui amenaient paître le troupeau, tant notre présence stressait les bêtes à corne qui passaient leur temps à cavaler au lieu de brouter paisiblement...
Celui-ci a dansé quand je lui ai donné mon chapeau...
Bye bye les Wodaabe...
On a bien essayé de revenir... au moins pour reprendre Hélène que nous avions oubliée en partant... Trop contente, Hélène, qui comptait refaire sa vie avec Ousmane, le fils du sultan, et que notre retour a désespérée.
Spéciale dédicace pour toi, Hélène...
Il est temps de rentrer à N'Djamena par des pistes parfois un peu hostiles, à nous comme aux autres...
... de retrouver les charmes de la civilisation...
... et de rendre une petite visite à Abel et Toumai, nos ancêtres tchadiens de respectivement 3,5 et 7,2 millions d'années.
Vincent, enlève ton masque, on t'a reconnu...
Il est surtout temps de conclure le blog pour cette fois.
Sur ces belles dernières images de nos amis d'un Geerewol...
Ciao les amis!!!
Mince, il manque le photographe, comme dab!!!
The end.